Un chrétien pakistanais demande à être protégé contre la persécution auprès de la plus haute juridiction européenne

  • Les autorités suisses rejettent la demande d’asile d’un chrétien pakistanais converti craignant à juste titre d’être persécuté.
  • La situation de la minorité la plus persécutée se détériore alors que les lois sur le blasphème créent une véritable culture de la peur

STRASBOURG (19 mars 2021) – Un ressortissant pakistanais se bat pour sa vie devant la Cour européenne des droits de l’homme. Les autorités suisses ont rejeté sa demande d’asile pour des motifs religieux. L’homme, connu sous les initiales « M.A.M », a fait appel contre son extradition en raison de sa conversion de l’islam au christianisme – une religion dont on sait qu’elle fait l’objet de persécutions terribles en Asie du Sud. Le groupe de défense des droits de l’homme ADF International est intervenu dans le cadre de son appel devant la plus haute juridiction européenne, en fournissant des informations actualisées sur la situation des convertis dans la région et en exposant les solides protections juridiques qui permettent non seulement de croire en quelque chose, mais aussi de vivre en accord avec ces croyances. Les arrêts de la Cour ont un impact sur plus de 800 millions d’Européens dans 47 pays.

« Personne ne devrait être persécuté pour ses croyances. Le Pakistan compte parmi les pays les plus dangereux pour les chrétiens, avec ses lois draconiennes sur le blasphème et sa violence croissante envers les groupes chrétiens. Les chrétiens convertis sont confrontés non seulement à la violence et à la discrimination de la société, mais aussi à des arrestations et à de longues peines de prison. La détention des chrétiens s’accompagne généralement de mauvais traitements et d’abus, tant physiques que psychologiques. Ces facteurs doivent faire partie de l’évaluation des risques pour ceux qui, comme M.A.M., demandent l’asile pour des motifs religieux », a déclaré Jennifer Lea, conseillère juridique de l’ADF International auprès de la Cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg.

Appel à l’action internationale face aux menaces alarmantes qui pèsent sur les convertis chrétiens

Si le Tribunal administratif fédéral suisse a affirmé que la conversion de M.A.M. était effectivement crédible et qu’elle avait eu lieu avant le rejet de sa demande d’asile, il a néanmoins estimé que ses droits à la vie, à la protection contre les traitements inhumains et à la liberté de pensée, de conscience ou de religion ne seraient pas menacés.

Le Pakistan occupe actuellement la cinquième place sur la World Watch List, qui classe les pays en fonction de leur niveau de persécution des chrétiens. Le niveau de persécution est qualifié d’ « extrême » en raison des lois sur le blasphème, qui prévoient la peine de mort. Les convertis de l’islam sont considérés comme des apostats et courent un risque particulièrement élevé.

Le cas d’Asia Bibi, une femme accusée de blasphème et détenue dans les couloirs de la mort pendant huit ans jusqu’à son acquittement, est un exemple bien connu de la menace actuelle. Après son acquittement, de violentes manifestations ont eu lieu dans tout le Pakistan, menaçant sa vie. Suite à une intense pression internationale, elle a finalement été autorisée à demander l’asile au Canada.

Mariages forcés des mineurs

ADF International, qui a un bureau en Asie du Sud-Est, soutient actuellement le cas de Maira Shabaz devant les tribunaux pakistanais. Cette jeune fille de 14 ans a été enlevée, violée et mariée dans le cadre d’une « conversion forcée » à laquelle elle a été confrontée en raison de son identité chrétienne. Maira attend dans la clandestinité pendant que son équipe juridique travaille à l’annulation de son certificat de mariage. Son histoire n’est qu’un exemple d’un phénomène violent qui touche chaque année un millier de filles issues de minorités religieuses au Pakistan.

« Le droit international protège le droit d’exprimer sa foi en public et en privé. Mais, au Pakistan, la simple tentative des chrétiens de parler de leur foi avec leurs voisins musulmans peut être poursuivie en vertu des lois sur le blasphème, qui peuvent entraîner la peine de mort. Les cas d’Asia Bibi et de Maira, qui ont retenu l’attention des médias internationaux, fournissent des exemples très concrets de la persécution à laquelle de nombreux chrétiens sont confrontés. Nous espérons que la Cour européenne des droits de l’homme reconnaîtra les dangers auxquels sont confrontés en particulier les chrétiens convertis au Pakistan, et qu’elle accordera une protection à M.A.M. et à d’autres personnes comme lui », a déclaré Tehmina Arora, directrice du plaidoyer pour l’Asie d’ADF International.

La loi anti-conversion de l’Uttar Pradesh utilisée pour cibler les chrétiens

Le pasteur Vimal (son nom a été modifié pour protéger sa discrétion) dirigeait récemment une réunion de prière dans un foyer chrétien d’Azamgarh, à laquelle participaient une dizaine de fidèles, lorsque la police est arrivée à l’improviste et a interrompu la prière. Certains opposants au christianisme avaient appelé la police en prétendant que des personnes étaient converties de force à la foi chrétienne lors de cette prière. Rapidement, une foule d’environ 60 malfaiteurs a encerclé la maison et a commencé à exiger l’arrestation des chrétiens.

Malgré la présence de la police, la foule s’est approchée des chrétiens, a commencé à les bousculer et a même utilisé des ceintures pour fouetter certains d’entre eux. Les chrétiens n’ont pas pu protéger le pasteur Vimal de leurs coups. Il a supplié la police d’épargner au moins les femmes et les enfants de leur colère.

Au lieu de prendre des mesures contre la foule violente, la police a arrêté le pasteur Vimal et deux autres chrétiens. Un signalement a été enregistré contre eux en vertu de la section 3/5 de la loi de l’Utar Pradesh sur l’interdiction de la conversion religieuse illégale ainsi que des sections 504 et 506 du Code pénal indien.

En prison, les chrétiens ont été battus à plusieurs reprises. Ils ont décrit leur séjour en prison comme étant l’ « enfer sur terre » ! Le pasteur Vimal n’arrive toujours pas à accepter le traitement horrible qui lui a été infligé pour avoir simplement prié avec d’autres chrétiens.

Il a rappelé comment en 2013, à l’âge de 25 ans, sa prière pour être guéri d’une maladie physique a été exaucée. Après cette expérience personnelle, il avait consacré sa vie au service des gens au nom du Christ. Il craint maintenant que la promesse constitutionnelle de la liberté religieuse ait été bafouée dans l’État à cause de cette nouvelle loi.

Les avocats partenaires d’ADF Inde avaient répondu à une demande d’aide de l’un des amis du pasteur Vimal et ont ensuite déposé une demande de libération sous caution. Le 5 janvier 2021, ils ont été libérés après deux semaines complètes en prison.

ADF Inde soutient le pasteur Vimal et ses amis après que les chrétiens aient été libérés sous caution.

La perturbation de la réunion de prière pacifique et le harcèlement des chrétiens constituent une violation directe des droits fondamentaux garantis par la Constitution. Il est extrêmement préoccupant que sur les 279 incidents de violence contre les chrétiens signalés en 2020, 70 provenaient de l’État d’Uttar Pradesh.

« Personne ne devrait être persécuté en raison de sa foi. La Constitution indienne reconnaît le droit à la liberté religieuse », a déclaré Tehmina Arora, directrice d’ADF Inde. Les avocats partenaires d’ADF Inde représentent le pasteur et ses amis et ont demandé à la Cour l’annulation de leur signalement et la suppression de la dangereuse loi anti-conversion. Tant que la nouvelle loi est en vigueur, le harcèlement des minorités religieuses devrait malheureusement s’intensifier.

L’interdiction déguisée de l’instruction en famille, véritable enjeu pour la liberté

Par Jennifer Lea, Juriste pour ADF International à Strasbourg, France – association de juristes défendant la liberté devant la CEDH, et qui a bénéficié de l’instruction en famille (IEF).

Que pourrait donc justifier la qualification des enfants qui bénéficient de l’instruction en famille comme étant des « sauvages » ? C’est pourtant ce que le Ministre de l’Education nationale affirme de façon indigne. Aussi choquant que cela soit, le 12 février 2021, après une première lecture, l’Assemblée Nationale, a décidé en faveur de la scolarisation obligatoire, signant ainsi l’arrêt de mort de l’instruction en famille, un droit pourtant sanctuarisé en 1882 par Jules Ferry.

Toutefois, aujourd’hui, la Commission de la Culture, de l’Education, et de la Communication au Senat offre de l’espoir : elle annonce qu’elle est en faveur de maintenir l’IEF et de supprimer l’Article 21. Rien n’est confirmé encore, le Senat doit encore débattre en plénière à partir du 30 mars et voter d’ici le 8 avril, lors de sa première lecture.

C’est donc avec grande confusion que le monde continue de porter le regard sur la France, pays des libertés, lors de ces débats sur l’Article 21 de ce projet de loi annoncé par le président le 2 octobre 2020. Ce projet de loi vise à combattre les séparatismes, ou plutôt à « conforter les principes républicains ».

Parmi les nombreuses restrictions proposées (contrôle de la liberté d’expression, contrôles sur la liberté de cultes, contrôles des associations, etc.), il est consternant de voir ciblé l’un des droits le plus fondamental – pratiqué par des personnes de tous bords – celui à l’instruction en famille. Dans un article du Monde le 12 février, la rapporteuse de l’article 21, Anne Brugnera, affirme bien de manière péremptoire que « le fait de retirer son enfant de l’école et de la société est une forme de séparatisme ».

Cependant, actuellement, près de 3 millions d’enfants dans le monde profitent de l’instruction en famille. Par exemple, le Royaume-Uni compte environ 48 000 enfants instruits en famille, le Canada 95 000, l’Australie 30 000 et les États-Unis 2,5 millions. Ces chiffrent ne cessent de croître chaque année. Selon l’UNESCO, des centaines de millions d’enfants supplémentaires sont actuellement instruits en famille en raison de la pandémie Covid-19. À quelques exceptions près, la majorité des pays européens autorisent cette pratique. En France, l’instruction en famille augmente, avec 62.000 entants instruits en famille, incluant ceux touchés par la pandémie. Cela n’empêche pas le gouvernement français de s’opposer à cette tendance mondiale en tentant d’interdire cette liberté fondamentale. Le ministre de l’Éducation nationale qualifie effectivement les enfants instruits en famille de « sauvages », le ministre de l’Intérieur de « petits fantômes de la république », et la Commission spéciale de l’Assemblée Nationale, emmenée sur le sujet par leur rapporteuse pour qui l’instruction n’est pas concevable, menace aussi les parents de retirer temporairement leurs droits parentaux en cas de non-respect de cette interdiction.

Toutefois, le Conseil d’État français s’oppose à cette interdiction surlignant que « le passage d’un régime de liberté encadrée et contrôlée à un régime d’interdiction ne paraît pas suffisamment justifié et proportionné », et la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme (CNCDH) soutient que « ces mesures limitent significativement la liberté d’enseignement. »

En dépit des mises en garde du Conseil d’État et de la Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme, des 489 amendements généraux, et des 160 signatures sur 40 amendements appelant à la suppression de l’Article 21, l’Assemblée Nationale a voté en faveur de l’interdiction de l’instruction en famille, avec entrée en vigueur des nouvelles dispositions fixée à septembre 2022. Les députés n’ont ajouté que quelques exceptions limitées : « la santé ou le handicap, l’itinérance de la famille ou éloignement géographique d’école, la pratique sportive ou musicale intensive », ou l’existence d’une « situation propre à l’enfant », concept particulièrement flou juridiquement et qui ouvre la voie à l’arbitraire. Ce faisant, l’Assemblée Nationale inquiète beaucoup les parents qui pratiquent l’instruction en famille, comme l’a souligné le député Charles de Courson en parlant de « violence à leur égard ». L’article 21 fait aussi basculer un régime de liberté déclaratif à un régime d’autorisation, ce qui revient à interdire l’instruction en famille sans réel justificatif. En effet, l’objectif du gouvernement français d’intégrer les enfants dans des écoles agréées par l’État pour prévenir les séparatismes n’est justifié ni par le principe républicain de liberté, ni par le droit international, ni par les données en France (ou ailleurs dans le monde). La loi et les recherches montrent aussi que la liberté en matière de choix d’éducation des enfants va dans l’intérêt de l’enfant et d’une société aux valeurs républicaines.

La croissance de l’instruction en famille dans le monde est bien fondée au regard du droit international, qui reconnaît les familles comme les éléments fondamentaux de la société, et qui favorise le choix parental en matière d’éducation. L’article 26 de la Déclaration universelle des droits de l’homme énonce cette liberté fondamentale : les parents doivent avoir le choix d’éduquer leurs enfants de la manière qu’ils jugent la plus appropriée. L’article 2 du protocole I de la Convention européenne des droits de l’homme est claire : les parents ont le droit de choisir l’éducation de leurs enfants. La Convention internationale des droits de l’enfant stipule clairement que les enfants ont le droit d’être éduqués en fonction de la culture, de la langue et des traditions de leurs parents. En outre, des données de recherche internationale sur l’instruction en famille montrent que ce type d’enseignement présente d’innombrables avantages pour les enfants, les familles et la société. Les enfants instruits en famille présentent un meilleur dossier scolaire, obtiennent de meilleurs résultats aux tests d’admission à l’université. Un taux plus élevé de ces enfants poursuivent des études supérieures. L’instruction en famille permet aussi aux familles de prendre en compte le niveau et le style d’apprentissage des enfants en tenant compte de leurs dons, de leurs difficultés et de leur personnalité. Cela permet aux enfants de perfectionner leurs compétences dans des domaines d’intérêt spécifiques. Les enfants instruits en famille passent également plus de temps avec leur famille à s’investir dans des projets de bénévolat associatif et de solidarité.

La France est fière de sa tradition républicaine et de sa devise « liberté, égalité, fraternité ». Cependant, poussée par le désir de vaincre les diverses influences séparatistes extérieures, cette liberté se retrouve rapidement érodée de l’intérieur. S’écartant dangereusement des lois internationales et des tendances mondiales en matière d’instruction en famille, la France se trouve à la croisée des chemins. L’État peut imposer le conformisme ou prendre position pour courageusement protéger ce « rêve de l’État idéal » que revendique George Clemenceau – un rêve qui ne deviendra réalité qu’en respectant les libertés fondamentales, et notamment la liberté de choix des parents et la dignité des enfants. Reste à espérer que le Sénat réaffirmera ces libertés lors de sa première lecture. France, effectivement, le monde entier te regarde !

« Vous rêvez de l’État idéal et, au nom de ce rêve, vous bâtissez l’omnipotence de l’État laïque qui est une tyrannie. »

George Clemenceau

À l’occasion de la Journée internationale de la femme, Maira, une survivante de 14 ans, espère être libérée

  • Une fille sur neuf dans les pays en développement est mariée avant son 15ème anniversaire ; les filles issues de minorités religieuses sont confrontées à un immense risque.
  • Maira, 14 ans, victime d’une « conversion » forcée, attend dans la clandestinité tandis que l’équipe juridique soutenue par ADF International travaille à l’annulation du certificat de mariage

VIENNE (5 mars 2021) – En cette Journée internationale de la femme, les jeunes filles chrétiennes du Pakistan craignent pour leur sécurité. Maira Shabaz connaît mieux que quiconque la dangereuse réalité. Elle a échappé à son ravisseur – mais pas avant qu’il ne la brutalise, la fasse chanter, l’épouse et la « convertisse » de force en lui faisant abandonner sa foi chrétienne.
La Haute Cour de Lahore a d’abord ordonné qu’elle soit rendue à son ravisseur.
Elle se cache depuis plusieurs mois avec sa famille. En collaboration avec l’avocat local Sumera Shafiq, ADF International cherche à faire annuler son certificat de mariage.

« Personne ne devrait être persécuté à cause de sa foi. Au Pakistan, des jeunes filles chrétiennes sont enlevées et converties par mariage forcé simplement à cause de leurs croyances. Le cas de Maira est un exemple choquant de ces pratiques. Nous espérons que la communauté internationale ouvrira les yeux sur ce qui se passe au Pakistan et aidera à protéger les chrétiens et les autres minorités qui appartiennent à certains des groupes les plus vulnérables du pays », a déclaré Tehmina Arora, directrice du plaidoyer pour l’Asie de l’ADF International.

La communauté internationale doit protéger les filles comme Maira

Selon l’ONU Femmes, environ 700 millions de filles dans le monde ont été mariées avant leur dix-huitième anniversaire. Dans les pays en développement, une fille sur trois est mariée avant l’âge de 18 ans et une sur neuf est mariée avant l’âge de 15 ans. 

Le Pakistan est reconnu comme l’un des endroits où il est le plus dangereux pour une femme d’être chrétienne. Le cas de Maira Shabaz met en lumière un problème plus large de « conversion » forcée par le mariage qui touche chaque année, selon les estimations, un millier de filles issues de minorités religieuses dans ce pays.
Cette pratique se fait généralement par le biais d’enlèvements, de violences sexuelles et de chantage. Les autorités locales sont souvent complices de ces cas. Malheureusement, les tribunaux n’ont souvent pas respecté la loi sur la limitation des mariages d’enfants, qui fixe l’âge légal du mariage pour les filles à 16 ans.

« La communauté internationale doit prendre des mesures pour empêcher des violations aussi extrêmes des droits fondamentaux au Pakistan. Le cas de Maira est un exemple beaucoup trop fréquent de ce à quoi les minorités religieuses sont confrontées dans le pays et qui ne peut plus passer inaperçu. Tout le monde a le droit de choisir librement et de vivre sa foi sans craindre la violence. Tous les États doivent veiller à ce que leurs lois et leurs politiques soient conformes à leurs engagements en matière de protection de la liberté religieuse en vertu du droit international », a déclaré Paul Coleman, directeur exécutif d’ADF international.